À la veille des Jeux, Huang Qi est en prison pour avoir fourni illégalement des renseignements outre-mer !
Et en plus le régime communiste boycotte la France...
À la veille des Jeux, Huang Qi est en prison pour avoir fourni illégalement des renseignements outre-mer !
par Pierre R.
Le correspondant du quotidien Le Monde à Shanghai, Brice Pedroletti, constate qu’« à un peu plus d’un mois de l’ouverture des Jeux olympiques de Pékin, la perception qui a longtemps prévalu, selon laquelle l’événement serait un "jackpot" pour l’économie chinoise est de moins en moins de mise : les nouvelles restrictions en matière de visa pour étrangers, la plus grande méfiance qu’inspire en Occident la Chine, le ressentiment des Chinois vis-à-vis des pays donneurs de leçons et, enfin, l’obsession sécuritaire des autorités entraînent d’ores et déjà des déconvenues dans le secteur le plus visible de l’économie olympique, celui du tourisme ». Le correspondant français cite en exemple le fait qu’en partie à cause du boycottage, par les Chinois, de la destination Paris, mais aussi en raison de la diminution des déplacements d’affaires ou de tourisme de Français en Chine, Air France a supprimé plusieurs vols par semaine sur le trajet Paris-Pékin et les tarifs disponibles sur l’Internet restent étonnamment bas pour cette saison.
Pendant ce temps, le cyber-dissident chinois, Huang Qi, célèbre pour son site internet de défense des droits de l’Homme, n’a pas été invité à la brève apparition de Hu Jintao, le numéro un chinois, sur le site du Quotidien du Peuple, organe du Parti communiste chinois (PCC). La raison est simple. Disparu depuis le 8 juin, enlevé par des inconnus à Chengdu, sa famille n’a été informée que tout récemment de sa mise en détention pour suspicion de : « détention illégale de secrets d’État ».
Le secrétaire général du PCC et président de la République, Hu Jintao, a avoué candidement que, lorsqu’il se trouve sur Internet, rarement, de son aveu, il s’intéresse principalement aux nouvelles de la Chine et de l’étranger. Seulement trois citoyens ont pu poser une question au président chinois, dont deux traitaient du même sujet : « Que faites-vous sur Internet ? » Et le brave homme de répondre brièvement : « J’y vais aussi pour comprendre quels sont les problèmes intéressant les internautes et quels sont leurs points de vue. Enfin, j’espère aussi comprendre leur opinion sur le travail du parti et du gouvernement ». En raison d’un horaire chargé, monsieur Jintao n’est resté que quelques minutes, évitant ainsi de répondre aux 300 questions que lui avaient adressées sur le forum de discussion des internautes.
Jintao s’est bien gardé d’aborder la cyber-dissidence qui est sévèrement réprimée en Chine. Et de donner des raisons logiques à la détention de Huang Qi, cet homme connu pour avoir créé le premier site chinois sur les droits de l’Homme. Ce cyber-dissident n’en est pas à sa première arrestation puisqu’il a déjà été incarcéré de 2000 à 2005 pour tentative de subversion de l’État après la création de son site pro-démocratie qui évoquait des affaires de corruption au sein du gouvernement. Il a reçu le prix 2004 de la cyberliberté attribué par l’organisation Reporters sans frontières.
Cette fois-ci, quel crime impute-t-on à Huang Qi ? Selon le rédacteur en chef du site www.64tianwang.com, Zhang Guo Ting, il est possible que cette nouvelle détention soit liée au dernier article que Huang Qi a publié sur Internet concernant l’arrestation d’une professeure retraitée, et son époux, de l’Université de Technologie du Sud-Ouest pour « divulgation d’informations à l’étranger ».
Rescapée du séisme qui a touché la région du Sichuan, madame Zheng Hongling, 53 ans, a publié une série de trois articles sur le site Internet chinois Observe China, hébergé aux Etats-Unis, intitulée : « Récits de mes aventures durant le tremblement de terre ». Ces articles critiquaient la gestion, par les autorités chinoises, de l’aide humanitaire internationale délivrée dans la région, ce que semblent confirmer le Centre américain du PEN International et le PEN Canada, le Comité pour la protection des journalistes (CPJ) et Reporters sans frontières (RSF).
Pour le Comité pour la protection des journalistes, il n’est pas recommandé de remettre en question la gestion des autorités chinoises en situation de désastre naturel. « L’arrestation et la disparition de ces reporters laissent entendre que les autorités dans la zone du tremblement de terre ont commencé à punir les personnes qui tentent de rendre publics des renseignements sur le terrible désastre survenu en mai », constate le CPJ. « Le gouvernement de Pékin doit protéger les journalistes qui sont attaqués au Sichuan à cause de leurs reportages plutôt que de mettre les responsables locaux du Parti communiste à l’abri de toute honte ». Madame Zheng Hongling est actuellement détenue au secret dans un centre de détention à Mianyang, où elle habite, une ville durement frappée par le séisme, pour avoir « fourni illégalement des renseignements outre-mer », dit le Centre du PEN chinois indépendant. Il faut voir impérativement Quand la Chine déblogue qui porte sur les écoles du Sichuan et cet autre lien sur une figure de l’establishment culturel chinois dont la « sortie » dénonçant les protestations de parents dans le Sichuan a provoqué de vives réactions sur internet.
Cela n’augure pas très bien pour les Jeux de Pékin. En plus des soucis économiques auxquels sont confrontées les autorités chinoises, la commissaire européenne aux Télécommunications, Viviane Reding, vient de leur adresser une énième admonestation, parmi des centaines d’autres qui sont restées lettre morte, à l’effet que la censure exercée sur internet est « inacceptable » et que les Jeux olympiques de Pékin seront l’occasion pour le pays de montrer son engagement à laisser l’information circuler librement. La Chine, qui compte la deuxième population d’internautes (210 millions) au monde derrière les États-Unis, est le pays qui emprisonne le plus de journalistes et d’écrivains. Pékin contrôle le secteur internet pour éliminer les contenus jugés pornographiques ou subversifs. Et dire que quelque 21.600 journalistes sont accrédités pour les Jeux de Pékin !
Quelles images de la vie quotidienne chinoise verrons-nous pendant la retransmission des Jeux ? Des chaînes étrangères ont demandé aux autorités chinoises de pouvoir montrer la place Tiananmen en direct pendant toute la durée des JO afin de faire de ces images une sorte de fond d’écran. L’absence de réponse ne laisse rien augurer de bon. Il semblerait, nonobstant cela, que la prise d’images à Pékin sans autorisation préalable et leur diffusion différée seront possibles durant les JO. Pour l’heure, la ville est de nouveau sous un brouillard humide et pollué. Circuler à vélo, parmi les plus de 3 millions de véhicules, est un défi pour les bronches. A six semaines des jeux Olympiques, Pékin respire mal, mais, pour les autorités, le prochain système de circulation alternée permettra d’avoir un air pur en août. De cette réalité, que verrons-nous en août ?
Les images des Jeux olympiques sont produites par OBS (Olympic broadcasting service), une organisation rattachée au CIO qui travaille en collaboration avec le comité d’organisation. Pour les jeux de Pékin, une entente est intervenue entre OBS et le BOCOG ( comité d’organisation de Pékin 2008 ) – pour mettre en place une nouvelle entité qui s’appelle le BOB (Beijing olympic broadcasting). « Le BOB devra travailler selon les règles du CIO qui stipulent notamment que, selon la tradition olympique, la couverture se doit d’être impartiale », a précisé la porte-parole du CIO, Emmanuelle Moreau. Le BOB aura la responsabilité de fournir le signal télévisuel en direct – via l’UER pour l’Europe – à toutes les chaînes qui détiennent les droits. Libres ensuite à ces dernières de choisir de les différer ou pas. Les télévisions nationales, qui sont détentrices des droits, auront des positions de TV qui leur sont propres. Ces emplacements pour leurs caméras leur permettent de se focaliser sur leur équipe nationale ou de faire des plateaux et des interviews en direct.
Au Canada, la télévision d’État détient les droits de retransmission des Jeux olympiques de Pékin. La société délèguera une équipe complète de journalistes qui « documentera » la vie chinoise. Les sujets à l’ordre du jour : Relations avec Taiwan, conséquences de la politique de l’enfant unique, le Net comme instrument de censure sont quelques exemples de sujets qui seront traités par cette équipe de neuf personnes, incluant les animateurs, que Radio-Canada déploiera sur place pour mettre cette émission en ondes.
En France, François Pêcheux présentera, en juillet, un reportage inédit sur la capitale chinoise en prime sur W9. « Pékin, ville du futur ou ville de la censure ? » est le nom du reportage que proposera l’animateur, diffusé en deux volets de 52 minutes dans le cadre du magazine d’investigation, Enquête d’action.
Selon le sénateur américain Sam Brownback, le gouvernement chinois a demandé aux grands hôtels locaux de censurer le trafic sur Internet à l’occasion des JO organisés cet été. Alors que les Jeux Olympiques de Pékin approchent, les relations se tendent entre la Chine et les Etats-Unis.
Pour protéger l’esprit olympique, rappelons-le, les athlètes français s’étaient vu refuser le port d’un badge « pour un monde meilleur », en référence au respect des droits de l’homme en Chine. La charte olympique impose la neutralité. Pourtant, le Comité international olympique vient d’autoriser une athlète iranienne à participer voilée aux Jeux Olympiques de Pékin. Annie Sugier, présidente d’Atlanta +, une association militant pour la promotion des femmes aux Jeux olympiques, est furieuse. « Selon la règle 51, aucune sorte de démonstration ou de propagande politique, religieuse ou raciale n’est autorisée dans un lieu, un site ou un autre emplacement olympique », soutient-elle. Faux, répond le CIO. La règle 51 ne s’applique pas à cette situation. Le badge « pour un monde meilleur » n’a pas été interdit puisque les athlètes français n’ont pas fait de demande officielle pour le porter, rétorque le CIO. Selon le CIO, mieux vaut donc une femme voilée qu’une femme absente.
Mieux vaut ignorer les questions de censure et de répression des droits de l’homme en Chine pour éviter de froisser le peuple chinois. Vaut mieux un dissident en prison que pas de jeux du tout !
Sources : AFP, Amnistie Internationale, Centre américain du PEN International, Comité pour la protection des journalistes, Cyberpresse, Le Monde, Reporters sans Frontières
Sources Cent papiers
Posté par Adriana Evangelizt